Rédactionnel.
Comment perdre une élection présidentielle à coup sûr. A l’évidence, Hillary Clinton n’a pu lire cet opuscule non traduit en anglais. Et pourtant, il lui aurait permis d’éviter bien des déconvenues…
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Glaciale. Cette défaite, l’ex-sénatrice de New York ne l’a certainement pas vu venir… pour être honnête, comme la plupart d’entre nous, votre serviteur inclus !
Créant un précédent historique, la victoire surprise de Donald Trump va faire pendant longtemps les beaux jours des commentateurs et enseignants en sciences politiques, en termes d’analyses. Ils s’y emploient d’ailleurs avec ardeur depuis mercredi.
Et pourtant, peu d’experts ont jusqu’à présent fait référence à cette grande règle d’or du combat électoral : on ne gagne pratiquement jamais une élection. C’est généralement l’adversaire qui la perd.
Il y a cinq ans, une personnalité bien connue des téléspectateurs français, a développé cette théorie en long et en large, allant jusqu’à l’exposer dans un essai concis et percutant : Patrice Carmouze. Oui, il s’agit bien du Patrice Carmouze que la France entière a découvert à la fin des années quatre-vingt aux côtés de son acolyte Christophe Dechavanne, et qui avant de devenir une célébrité du petit écran, fut pendant cinq ans (de 1983 à 1988) le rédacteur en chef du très sérieux Quotidien de Paris, aux côtés de Philippe Tesson.
Dans son ouvrage paru en 2011, Patrice Carmouze rappelle simplement qu’à l’issue du processus de filtrage politique auquel s’apparentent un premier tour et/ou une élection primaire, il ne reste plus que deux candidats en situation d’accéder au pouvoir, dont pour autant les scores initiaux, même réunis, ne représentent jamais la majorité des inscrits.
A partir de ce moment-là, au deuxième tour, l’électeur élimine celui des deux candidats qu’il ne veut vraiment pas voir entrer à l’Elysée, sans pour autant adhérer au projet politique de son candidat par dépit… ce qui au passage explique selon l’auteur, l’absence d’état de grâce depuis 1995, le naufrage dans l’impopularité de tout nouveau pouvoir en moins de six mois, et par voies de conséquences l’impossibilité de mettre en place le programme de réformes voulu par le vainqueur !
Patrice Carmouze nous invite ainsi à comprendre davantage l’échec de l’un, que la victoire de l’autre, cette dernière n’étant que la conséquence de la première.
A cet effet, l’auteur conceptualisait huit syndromes-types de l’échec aux élections présidentielles. Force est de constater que le cas d’Hillary Clinton s’inscrit parfaitement dans deux d’entre eux : le syndrome Balladur (ou comment perdre une élection en pensant qu’elle est jouée d’avance) et le syndrome Jospin (ou comment l’absence de désir conduit inexorablement à l’échec). Une grille d’analyse imparable. Prémonitoire en tout cas pour Madame Clinton.
La campagne américaine de 2016 appartient désormais au passé et donc à l’histoire. Mais une autre campagne électorale s’annonce dès aujourd’hui : la présidentielle française de 2017. Dans son ouvrage de 2011, Patrice Carmouze, évoquant à l’époque la future présidentielle de 2012, listait dix raisons pour lesquelles Marine Le Pen serait selon lui présente au second tour, puis a contrario dix autres raisons pour lesquelles elle ne le serait pas. En relisant attentivement ces deux listes, huit arguments sur dix de la première liste me semblent toujours d’actualité, et seulement cinq de la seconde.
Quant à l’issue finale… Patrice Carmouze avait choisi d’intituler sa conclusion : mais qui va réussir à perdre ? Nous sommes aujourd’hui à moins de six mois de l’élection de futur Président, et à peine sept jours du premier tour de la primaire Les Républicains. A bon entendeur.
Pour en savoir plus – Vidéo
Interview TV (11 minutes) sur TVFIL 78 en date du 8 décembre 2011 de Patrice Carmouze, relative à la politique et à son ouvrage Comment perdre une élection présidentielle à coup sûr (début à 03m02s)
Pour en savoir plus – Bibliographie
Patrice Carmouze, Comment perdre une élection présidentielle à coup sûr, Robert Laffont, 2011, ISBN 978-2-221-12647-9, 210 pages (pour en savoir plus, cliquez ici)
Crédits photos
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